La STIB et BOZAR s’associent pour faire résonner le métro du bruit des traits de cet artiste adulé. Peintre, dessinateur, graffeur (même s’il réfutait le terme), colleur, vidéaste, performer, Keith Haring était surtout engagé (lutte pour les droits des LGBTQI, contre le SIDA, le nucléaire, le racisme…). De quoi avoir envie de le célébrer tout en gâtant nos usagers !
Avant d’être reprise, reproduite, remarketée, réinventée, l’oeuvre de Keith Haring – figure incontournable de l’art contemporain et du street art des années 80 – était une expression urbaine graffée. Les couloirs du métro new-yorkais lui servaient de support d’expression. Durant la première moitié des eigties, on estime à plus de 5.000 le nombre d’œuvres tracées à la craie blanche (et non à la bombe de peinture) sur le papier noir mat protecteur collé sur les valves entre chaque campagne d’affichage de marques. Des supports détournés qui deviendront des œuvres d’art cotées.
Des productions voulues par Keith comme accessibles, offertes, visibles par le plus grand nombre, loin des galeries et de leurs sélections insensées. Un statement en opposition au marché de l’art et de la réclame qui l’inspire pour trafiquer des affiches de pub qu’il croise. Un grand cri adressé à la politique, aux injustices, à l’oppression et aux dérives de l’époque.
Pendant cinq ans, chaque jour, il arpente les couloirs du métro et lâche, du bout de ses doigts graciles, des figures graphiques, linéaires, profondes et pourtant sans perspective, compréhensibles instantanément.
C’est ce qui l’a porté au sommet, ce qui l’a mené à travailler sur son autopromo, alors que n’existaient même pas les réseaux sociaux. Il fait diffuser son arrestation par la police en pleine « dégradation de, l’espace public », offre des pins et t-shirts ornés de ses personnages emblématiques (inspirés des dessins du désert de Nazca) aux conducteurs de métro, voit ses œuvres arrachées de leur support par des collectionneurs en herbe flairant le génie.
La valeur de ses productions s’envole, lui permettant de jongler entre rentrées confortables tirées d’opérations artistico-marketing brillantes et créations spontanées et philanthropiques pleines de bonté et de beauté.
Et puisque l’Histoire n’a pas de fin, même 30 ans après son décès, c’est dans le métro de Bruxelles que se poursuit le don de sa créativité : dès mars, une fresque géante de Keith Haring viendra secouer le métro Rogier et plein de surprises (concours, réductions…) viendront compléter cette expérience arty-mobility.